À l’automne 1694, on termina la construction d’un nouvel Hôtel-Dieu plus imposant, juste à côté de celui qu’on avait érigé sur le même site quarante ans plus tôt. Les Hospitalières eurent à peine le temps de s’y installer car, le 24 février 1695, un incendie d’origine mystérieuse détruisit l’ensemble des bâtiments.
Le 19 juin 1721, l’Hôtel-Dieu brûle encore!
Comme le prouve l’événement suivant, il est difficile de faire respecter les ordonnances dans la colonie. En effet, le 21 mai 1721, l’intendant Begon défend à quiconque de tirer des coups de fusils dans l’enceinte des villes. Pourtant, le 19 juin 1721, par une journée très chaude et venteuse, au moment où la procession de la Fête-Dieu quittait l’église des Hospitalières pour se diriger vers l’église Notre-Dame, un groupe d’arquebusiers voulut saluer la procession en tirant une salve en l’air. L’un d’eux fit feu par mégarde en direction du portail de l’église. Le feu gagna la toiture en un rien de temps et le sanctuaire s’embrasa avec une incroyable rapidité. Les citoyens accourus sur les lieux ne purent rien pour arrêter les flammes qui gagnèrent l’Hôtel-Dieu lui-même et la maison des religieuses. Montréal subissait sa première conflagration et elle fut terrible. Soufflées par le vent, les flammes rasèrent en quelques heures près de la moitié de la ville: 138 maisons furent détruites ainsi que des magasins et autres bâtiments.
Le 10 avril 1734, une esclave est accusée d’avoir mit le feu à la résidence de sa maîtresse.
Le tocsin retentit peu après 19h le 10 avril 1734. Le feu était pris sous la toiture d’une maison de la rue Saint-Paul, face à l’Hôtel-Dieu, la résidence de Thérèse de Couagne. L’incendie avait à peine débuté que les soupçons se portèrent sur une esclave de Mme de Couagne, Marie-Joseph-Angélique. Et les soupçons eurent tôt fait de se transformer en accusation. On évoqua des motifs aussi opposés que l’esprit de vengeance – sa maîtresse songeait à s’en départir en la vendant aux enchères – ou l’amour – elle désirait fuir avec Claude Thibault, un domestique de la maison. L’incendie devint un conflagration et brûla 46 maisons, et pour une troisième fois en moins de quarante ans, l’Hôtel-Dieu fut détruit. Le châtiment réservé à la présumée incendiaire compta parmi les plus cruels jamais administrés dans la colonie. Durant un procès où les preuves présentées furent au mieux circonstancielles, on tenta d’obtenir des aveux de Marie-Joseph-Angélique en la soumettant à ce qu’on appelait « la question ». Autrement dit, elle fut torturée. Condamnée d’abord à avoir la main tranchée puis à être brûlée vive, la présumée coupable fut plutôt pendue puis brûlée sur la place publique après avoir été promenée dans un tombereau servant au ramassage des immondices, des écriteaux sur lesquels les citoyens pouvaient lire « incendiaire » accrochés à son cou, un à l’avant, l’autre à l’arrière. L’exécution de Marie-Joseph-Angéline eut lieu le 21 juin 1734.
En sa mémoire, en février 2012, le parc Marie-Joseph-Angélique est inauguré à Montréal.